Introduction
Qu’est-ce que ça veut dire que “prouvé scientifiquement” ? Comment s’en assurer ? Dans cet épisode nous allons chercher à comprendre ce qu’est une bonne étude scientifique, et tout ce que ça implique. 😉
Qu’est ce que la science et l’épistémologie ?
Commençons par la base : qu’est-ce que la science ?
La science est un processus méthodique d’acquisition de connaissances. Elle repose sur l’observation, l’expérimentation et la formulation de théories qui peuvent être testées et vérifiées.
Mais comment savons-nous que ce que nous découvrons est vrai ? C’est là qu’intervient l’épistémologie. L’épistémologie est la branche de la philosophie qui étudie la nature et la portée des connaissances.
Il y a plusieurs sciences, ce n’est ni simple, ni binaire. Il y a aussi énormément de méthodologies différentes en science, plusieurs approches, types d’expériences, types d’études, etc.
Dans le domaine canin, on se base essentiellement sur 2 branches :
- L’éthologie qui vient de la biologie.
- Le BEHAVIORISME qui vient de la psychologie.
Les 2 sont finalement très similaires, il est parfois difficile de les distinguer.
Dans tous les cas, l’objectif est toujours le même : objectiver pour pouvoir tirer des conclusions.
Quel est le lien entre la science et l’éducation canine ?
Si on revient quelques dizaines d’années en arrière, les personnes ont d’abord tenté de réfléchir à des théories (je pourrais faire peur au chien, ou bien je pourrais essayer de faire de la télépathie, ou bien je pourrais le laisser dormir dans ma chambre pour qu’il passe plus de temps avec moi et qu’il me comprenne mieux…)
Mais ensuite, il va falloir tester ces théories. C’est là que la science intervient en essayant UNE théorie, puis OBSERVER si ça marche.
Voici les éléments dont on a besoin pour mener une étude scientifique rigoureuse :
- Tester sur un grand échantillon de chiens, et non pas sur un seul chien. En effet, si je teste avec un seul chien, peut être que ce chien ne rentre pas dans la “moyenne”, peut-être qu’il est anormalement intelligent ou apeuré ou autre.
- Ensuite il faut un “groupe contrôle”. C’est à dire que pour observer s’il y a des changements, il faut aussi pouvoir observer que dans l’autre groupe il n’y a PAS de changement. Car des changements, il y en a toujours. Si je passe 5 ans avec un chien, forcément qu’il va être différent
Comment l’étude scientifique est construite.
Élaborer des critères d’observation (qu’est ce que je vais observer ? Comment est ce que je vais mesurer ?)
Avant même de commencer une étude scientifique, il faut mettre en mot ce que l’on cherche. En science, on ne peut pas chercher “quelque chose” sans trop savoir quoi. On va alors :
- Emettre une question de recherche ; exemple : “L’enrichissement environnemental réduit-il les comportements destructeurs chez les chiens domestiques ?
- Elaborer des hypothèses ; exemple : “Les chiens exposés à un enrichissement environnemental montrent moins de comportements destructeurs que ceux qui ne le sont pas.”
En éducation canine, il y a des concepts qui nous intéressent mais qui sont assez abstraits, comme :
L’obéissance, les émotions, une méthode, la relation entre le chien et l’humain, etc.
Donc il va falloir découper tout cela pour y transformer en “observable et quantifiable”.
Recueillir les données
Les outils de recueil de données sont essentiels pour enregistrer les observations de manière systématique et précise. Les outils peuvent varier en fonction des comportements observés et des ressources disponibles.
- Observations directes : Les chercheurs notent les comportements en temps réel.
- Vidéos : Filmer les comportements pour une analyse ultérieure.
- Journaux de bord : Tenir des notes détaillées des observations quotidiennes.
- Capteurs et dispositifs de suivi : Utiliser des GPS, des colliers ou d’autres technologies pour suivre les mouvements et les activités.
Les groupe de contrôle et groupes expérimental
Il existe deux types de groupes :
- Groupe contrôle : Ce groupe ne reçoit pas le traitement ou la condition expérimentale. Il sert de référence pour comparer les effets du traitement.
- Groupe expérimental : Ce groupe reçoit le traitement ou la condition expérimentale. Par exemple, dans notre hypothèse, le groupe expérimental serait les chiens qui reçoivent un enrichissement environnemental.
Sans groupe contrôle, une étude est biaisée. C’est pourquoi quand on veut tester quelque chose on a besoin de pouvoir ISOLER le facteur le plus important (chose très difficile).
L’échantillonnage
Il faut sélectionner un nombre suffisant de sujets pour s’assurer que les résultats sont représentatifs et généralisables. Plus l’échantillon est grand, plus les résultats sont fiables.
Les variables et unités de mesure
Il y a plusieurs variables :
- Variables indépendantes : Ce sont les facteurs que le chercheur manipule. Dans notre exemple, l’enrichissement environnemental est la variable indépendante.
- Variables dépendantes : Ce sont les résultats mesurés pour voir l’effet des variables indépendantes. Ici, les comportements destructeurs des chiens sont la variable dépendante.
Il faut vraiment pouvoir contrôler un maximum les variables extérieurs, le but dans une étude c’est que le SEUL critère qui change, ce soit EXACTEMENT ce que je veux mesurer.
L’analyse statistique
L’analyse statistique permet de déterminer si les résultats observés sont significatifs et non dus au hasard. Des tests statistiques comme le test t, l’ANOVA, ou les tests de chi carré sont couramment utilisés
Mise en pratique d’un exemple concret
Reprenons l’exemple de l’enrichissement environnemental pour illustrer ces concepts.
- Question de recherche : “L’enrichissement environnemental réduit-il les comportements destructeurs chez les chiens domestiques ?”
- Hypothèse : Les chiens exposés à un enrichissement environnemental montrent moins de comportements destructeurs que ceux qui ne le sont pas.
- Groupe contrôle et groupe expérimental : Groupe contrôle : Un groupe de chiens qui ne reçoit aucun enrichissement supplémentaire. Groupe expérimental : Un groupe de chiens qui reçoit des jouets, des activités et des interactions supplémentaires.(en présicant quel contexte, combien de temps, quelle manière, etc.)
- Échantillonnage : 30 chiens dans chaque groupe, choisis de manière aléatoire parmi une population plus large.
- Variables et unités de mesure :Indépendante : Enrichissement environnemental. Dépendante :Comportements destructeurs mesurés par le nombre de fois qu’un chien mâche des objets inappropriés par jour (fréquence), la durée (en minutes) passée à creuser des trous dans le jardin par jour, et le nombre de fois qu’un chien déchire des vêtements ou du linge par semaine.
- Procédures expérimentales : Standardiser le temps d’observation, les types de jouets utilisés pour l’enrichissement, et les conditions environnementales.
- Analyse statistique : Comparer les moyennes de comportements destructeurs entre les deux groupes à l’aide d’un test t.
- Réplication : Répéter l’étude avec un autre échantillon de chiens pour vérifier la robustesse des résultats.
En suivant ces étapes et en définissant clairement la question de recherche, les critères d’observation, et les outils de recueil de données, les chercheurs peuvent mener une étude scientifique rigoureuse en éthologie et obtenir des résultats fiables et significatifs.
Petite histoire des études scientifiques qui ont été menées autour du domaine canin jusqu’à aujourd’hui
Avant de finir cet épisode, j’aimerais vous faire un résumé des premières études scientifiques sur les chiens.
- Ivan Pavlov et le conditionnement classique : Il a découvert que si un stimulus neutre (comme un son de cloche) était présenté juste avant la nourriture à plusieurs reprises, les chiens finiraient par saliver en réponse au son seul, même sans nourriture. Les principes du conditionnement classique sont utilisés dans l’éducation canine pour associer des stimuli neutres à des réponses désirées.
- B.F. Skinner et le conditionnement opérant : Skinner a utilisé une boîte appelée “boîte de Skinner” pour étudier le comportement des animaux. Skinner a découvert que les comportements suivis de récompenses tendent à se répéter, tandis que les comportements suivis de punitions ou de l’absence de récompenses tendent à diminuer.
- Edward Thorndike et la loi de l’effet : Il a développé la “loi de l’effet”. Selon cette loi, les comportements suivis de conséquences satisfaisantes sont plus susceptibles d’être répétés, tandis que ceux suivis de conséquences désagréables sont moins susceptibles d’être répétés. Thorndike a utilisé une boîte de puzzle pour étudier comment les animaux résolvent des problèmes. Ses observations ont conduit à la formulation de la loi de l’effet.
- Konrad Lorenz et l’éthologie : Ses travaux ont mis en évidence l’importance de l’empreinte et des comportements innés chez les animaux.
- John Paul Scott et John L. Fuller : Leurs recherches ont porté sur les différences comportementales entre différentes races de chiens et sur les interactions entre la génétique et l’environnement.
Conclusion
Dans ce premier épisode, on a pu voir comment on construit une étude scientifique dans le comportement canin (éthologie / behaviorisme).
Dans le deuxième épisode on parlera des biais dans lequel on peut se méfier en science, comment rechercher une source scientifique fiable mais aussi de l’expérience.
